A l’heure ou le dégagement des cadres de la fonction publique a déjà commencé au MEEDDAT (MEDAD/DGPA/DP/Cadres en mobilité accompagnée/Projet de contrat février 2008), ministère d’Etat de M. Borloo, les personnels de Météo-France ont, à l’évidence, besoin d’entendre un discours plus centré sur les questions scientifiques et sur la notion de service public. Se soumettre ou se démettre ?
Raffarin 25/10/04 : « La conduite du changement est un métier à part entière, les contraintes d’évolution de la sphère privée en font un laboratoire formidable dont l’Etat doit s’inspirer ». En juin 2003, la circulaire Raffarin concernant les stratégies ministérielles de réforme et la réforme de l’Etat fixe des objectifs : Face à ceux qui préconisent la suppression des corps, l’ouverture vers des cadres d’emplois, la mobilité au profil, la généralisation des emplois fonctionnels ou encore des statuts d’emploi, bref l’abandon des fondements du statut général, nous opposons une Fonction publique de carrière base de la neutralité du service public, seule voie qui s’inscrit dans une perspective porteuse d’une Fonction publique d’avenir et attractive dans le temps comme dans la mobilité. |
La formation des « managers » de Météo-France
Se soumettre ou se démettre ?
Selon le "Directeur du Laboratoire des sciences sociales du politique, membre du Comité des études et de la prospective de la DGAFP, expert auprès de la Commission européenne" pour réussir une réforme, la base de tout c’est "dépenser un peu pour gagner beaucoup [1]".
A l’heure ou le dégagement des cadres de la fonction publique a déjà commencé au MEEDDAT [2], les personnels de Météo France ont, à l’évidence, besoin d’entendre un discours plus centré sur les questions scientifiques et sur la notion de service public. Ils ont besoin d’entendre, de la part de l’encadrement, des expressions différentes du credo imposé par le PDG.
Rompre le silence des cadres
Avec la mise en place du plan stratégique et les grandes manoeuvres gouvernementales visant à la destruction de la Fonction Publique et du service public, « RGPP » et projet de loi « mobilité », les IPC de Météo France se chargeraient d’annoncer les réorganisations ou les fermetures de services, et de travailler sur les suppressions de centres et les IT devraient accompagner ces évolutions. Les personnels de Météo France ont, à l’évidence, besoin d’entendre un discours plus centré sur les questions scientifiques et sur la notion de service public. Ils ont besoin d’entendre, de la part de l’encadrement, des expressions différentes du credo imposé par le PDG. De son côté, l’encadrement doit se sentir libre d’agir et réagir. Pour cela, il doit sortir de l’isolement dans lequel la Direction l’enferme progressivement.
La Direction Générale de Météo-France forme ses managers
Selon la DRH, « Compte tenu des échéances importantes à venir pour l’établissement notamment liées à la démarche stratégique, il apparaît encore plus d’actualité d’apporter à l’encadrement intermédiaire la préparation et les outils nécessaires à l’accompagnement de ces évolutions.
Le contrat d’objectifs 2005/2008 avait en matière de formation prévu la réalisation d’un cursus de formation au management destiné plus particulièrement aux cadres intermédiaires afin de leur apporter, concrètement, la capacité de diriger leurs équipes et leurs relations partenariales, et plus largement de gérer leur travail quotidien en phase avec l’évolution des missions, de l’organisation, et des activités de Météo-France, dans le contexte de la mise en œuvre des contrats d’objectifs de l’établissement. »
Cette formation d’une durée de 6 jours a été mise en place depuis 2007 pour environ 300 agents. Les modules traitant des fondamentaux du management et du management opérationnel (gestion du temps, établissement d’un diagnostic, démarche par objectifs, méthodes de suivi et d’évaluation ; entretien professionnel, organisation et conduite des réunions) sont animés par un prestataire extérieur.
Le malaise croissant de l’encadrement, des situations professionnelles courantes.
Les cadres en France, comme les « Professionals & Managers » dans le monde anglo-saxon, sont reconnus par quatre capacités mises en oeuvre de manière concomitante : technicité, autonomie, initiative, responsabilité.
La technicité exprime la mise en oeuvre pratique de connaissances théoriques et de savoir faire acquis sur le terrain.
L’autonomie et l’initiative se combinent souvent pour définir la capacité d’action, par un ajustement entre les règles et principes déjà existants et ceux qu’ils se déterminent individuellement ou collectivement.
La responsabilité est un principe d’action, d’anticipation, de diligence et de précaution dans la sphère professionnelle. Si être responsable, c’est être capable de répondre, c’est aussi faire, anticiper et prévoir, puis rendre compte.
Chez nombre de cadres du privé s’est développé le sentiment que leurs compétences sont dévoyées pour être mises au service de stratégies d’entreprises décidées en dehors d’eux. La logique purement financière prend le dessus. Les personnels d’encadrement sont contraints d’assumer des contradictions vécues souvent individuellement. Soucieux de l’exercice de leurs responsabilités, ils sont nombreux à vivre mal les évolutions en cours dans nos entreprises qu’elles soient privées ou publiques. Ce malaise frappe maintenant de plein fouet les cadres du public qui ont de plus en plus de mal à concilier droits et devoirs du fonctionnaire avec les ordres tombant de la Direction et des ministères. Le malaise des personnels d’encadrement vient de situations trop fréquemment imposées : intensifier le travail, diriger une équipe en sous-effectif, mettre au point une réorganisation qui entraîne des suppressions d’emplois, réduire les exigences de qualité pour tenir les délais de production, gérer les relations obscures avec les filiales...
Faire des choix entre la mise en oeuvre des ordres donnés et le droit, la sécurité ou l’éthique conduit souvent à choisir entre conscience citoyenne et avenir professionnel. Les logiques financières se moquent de l’emploi, parfois de la sécurité voire de la moralité des affaires. Alors pour les cadres, une seule alternative : se soumettre ou se démettre ?
L’outil syndical
La Direction aborde très souvent la question de la responsabilité dans sa politique de communication (forum de la DG), mais n’offre pas pour autant aux cadres les moyens de l’exercice effectif de leur responsabilité professionnelle et sociale. Contrairement aux stratégies « managériales », le syndicat respecte le droit pour chaque syndiqué à être informé, écouté et à participer aux décisions. Le syndicat est l’outil pour défendre et conquérir des droits individuels et collectifs pour le personnel d’encadrement. Il permet d’agir ensemble pour peser sur les évènements. Ni catégoriel, ni généraliste, le syndicat est l’outil qui offre cette possibilité d’être entendus, défendus en convergence avec les autres catégories de salariés, en contribuant à l’unité du salariat.
Citoyenneté dans l’entreprise, le droit de refus
Dans ce contexte, il est urgent de créer les conditions d’un espace public de réflexion et d’action sur la responsabilité des cadres pour qu’ils aient les moyens de l’exercice effectif de leur responsabilité professionnelle et sociale. Cela passe par un droit de refus et d’alternative. « Un droit de refus, dès lors que l’objectif fixé ou l’ordre donné ne respecte pas le droit, les règles de sécurité, l’éthique professionnelle ou la santé des autres salariés. Ce droit explicite de refuser une directive doit être garanti par l’interdiction de sanctions à l’égard du salarié et des dispositifs de recours. »
La Cgt a cosigné avec plusieurs organisations, associations professionnelles et syndicales, un manifeste sur la responsabilité sociale des cadres. L’objectif est de revendiquer un droit à une parole différenciée et alternative pour ceux qui n’arrivent pas à risquer individuellement cette parole. Il s’agit de ne pas être conduit à assumer des choix contradictoires entre la morale et le respect des ordres, entre la sécurité et l’efficacité, entre sa conscience citoyenne, la prospérité de l’entreprise et son avenir professionnel.
La Cgt appelle tous les personnels de l’encadrement à débattre de ce manifeste, à s’en emparer, à créer les conditions d’une unité large autour de ses objectifs. Ils doivent pouvoir assumer pleinement leur responsabilité de fonctionnaire en utilisant leur force de proposition pour apporter des réponses ambitieuses aux vraies questions stratégiques que doit se poser Météo France pour définir son avenir : prévisions à toutes les échelles, changements climatiques, environnement...
C’est au risque de la libre expression que peut se construire l’intérêt général.
Michel Edwell